Dans trois ans...
.
Que cela sera joli - ta petite tête au yeux étonnés
dépassant à peine du haut pré fleuri d'ombelles blanches
lorsque nous irons explorer le monde ensemble
Toi flageolant encore sur tes courtes jambes potelées
.
Tu questionneras sur le chat furtif agitant la foison des tiges
Sur la perdrix qui jaillit sous nos pas en faisant ronfler
lourdement ses ailes (et je t'aurai vu tressaillir et suivre
l'essor fasciné de l'oiseau) Sur telle pierre ou tronc coupé
.
Sur les fourmis longeant la rivière à la queue-leu-leu
si minuscules et – pourtant – pleines de jambes filiformes
Ton doigt désignera la poire verte qui – ploc ! - a sauté
dans l'eau et moi de tes étonnements je ferai mes délices...
.
Explosion
.
J'anticipe déjà l'immense déflagration de joie
que sera pour nous - tes ascendants surpris -
le fait d'assister à ton premier éclat de rire
spasmes de bonheur de ton corps tout neuf
.
Il sera sans nul doute communicatif par réaction
en chaîne emportant l'assistance dans un mouvement
capable d'enfouir nos angoisses sous son insouciance
donnant un instant l'illusion que vivre n'est pas tragique
.
Jadis il me fut donné d'assister à celui de ton père
Et je sais par avance Ezra comment retentira le tien
Ton rire sera net comme un cristal Puissant et frais
comme une avalanche décrochée d'un sommet inviolé
Variations ascensionnelles
.
Ce serait sous le haut couvert des pins où le ciel frissonne
Nous observerions comme entre ses mains fines l’écureuil
sans cesse actif tourne la pomme écailleuse qu’il décortique
Des mains petites comme sont tes mains de nouveau-né
.
Ce serait devant la haute mer dont le matin verdit la vague
Nous écouterions le cri des mouettes qui traversent nos regards
en batifolant libres parmi les nuées d’un étage à l’autre de l’été
Des cris un peu plaintifs légers comme un vagir de nourrisson
.
Il y aurait la montagne aussi quand elle éclaire de ses neiges
les soirs dorés par la lueur déclinante du dieu Je t’aurais transmis
le goût du pur effort de roc en roc et du monde vu d’en haut
quand îlot le sommet perce les blancheurs d’une intangible mer
.
El sonido de la kena
.
Si vient le jour où tu sois assez grand et moi-même assez
vivant Ezra je te jouerai sur la kena des mélodies venues
du fond des âges et jadis reçues d'amis d'un autre siècle
Elles t'apprendront sans doute comme à moi la nostalgie
.
Ce sont chansons d'un peuple qui n'eut d'autre loisir
que de cramponner sa terre ingrate et de résister sans fin
sur de haut-plateaux cernés de monts enneigés et de pauvreté
Un froid glacial y transissait les vigognes de l'août sur l'étendue
.
Ils habitaient des masures en glaise pourpre desséchée
Au jour le jour broyant les grains d'une sombre lumière
Ils vivaient en s'aidant d'un alcool mûri de salive édentée
Et pourtant ils savaient tournoyer en des fêtes multicolores
.
Jalousie élémentaire
.
Au vent j'ai dit qu'un petit fils m'est né aussi délicat
et précieux qu'un fin coquillage rose porcelaine
Le vent m'a dit je ne peux rien pour toi sinon
te souffler un poème et il a vitement passé son chemin
.
À la mer j'ai crié par dessus la rumeur des vagues
qu'un petit fils m'était né Elle m'a ressassé de sa gorge
pleine de galets que ce miracle n'était pas rare
et que les humains sont l'écume de l'univers
.
Aux échos de la montagne j'ai fait redire qu'il m'est né
un petit-fils gracieux fort et léger comme fleur d'edelweiss
Ensemble ils m'ont répondu qu'il n'y avait pas à en faire
tout un plat J'ai ri de ce que me jalousait la terre entière
.
Insulaire
.
Né donc au sein d'une cité lointaine au bord de l'océan
te voici l'enfant d'une île et cette idée au fond me sourit
Tu auras des prunelles aux iris changeants comme les nues
de ton pays où pluie et soleil constamment se disputent
.
Tu parleras la langue du monde au point – je l'imagine -
de ne jamais pouvoir comprendre les poèmes dont tu es
le si joli prétexte Car déjà mon enfant la langue que je parle
est une langue morte obscure à mes contemporains
.
Cela n'a guère d'importance au demeurant puisque tu seras
aimé par ceux que j'aime et qui dureront heureusement
plus longtemps que moi Et confusément parfois te reviendra
l'image d'un très vieil homme dont tu ne sauras plus le nom
.
Surrection
.
Je t'ai regardé longtemps dans tes langes cette première fois
davantage pétrifié d'être soudain grand-père que je ne l'avais été
d'être père jadis Le silence était de loin en loin troublé par les cris
des mouettes en maraude qui venaient du port aux beaux voiliers
.
Je t'ai regardé longtemps Ne crois pas que c'était pour chercher
les traits d'une quelconque ressemblance ou profil héréditaire
Non Seulement pour prendre conscience de ce que les années
m'ont appris De cette sorte de minuscule prodige qui jamais
.
n'a d'équivalent L'infime présence neuve incomparable avec
déjà ce regard inouï qui ne mettra que trois jour pour fixer
les choses et ces yeux qui plantent dans les nôtres d'un coup
l'impénétrable profondeur d'un Jugement encore inaltéré
.
Présomptions
.
Que je serais heureux Ezra lorsque tu auras un an ou deux
si tes petites jambes te pouvaient déjà tenir en équilibre
à la surface de notre planète – d'avec toi marcher dans un champ
tapissé de fleurs claires sous les oliviers Tu regarderais
.
l'éclaircie de ciel bleu entre les frondaisons et vaguement
tu te souviendrais d'avant ta naissance lorsque tu n'étais
qu'un éclair de fusion dans les regards de tes parents
Une secrète lueur mauve irradiant d'attraction magnétique
.
En te regardant je comprendrais J'aurais moi-aussi comme un rien
de nostalgie du temps où jeune père en promenade je serrais
l'étroite main d'un enfant d'autrefois qui te ressemble tant
et fait de ma mémoire le paradis caché de séquences inoubliées !
.
Mysterraqué
.
Peut-être Ezra parlerons-nous un jour ensemble de la vie
Tu me diras d'une petite voix nette de little boy des choses
analogues aux réflexions saisissantes et drôles que me faisait
ton père au même âge Car enfant l'on discerne encore sans
.
le savoir ce qu'a de saugrenu et chaotique un réel devenu
- pour nous les vieux - terne falot banal insipide incolore
en somme habituel Ce sera comme la brise au point du jour
qui tire au clair tout l'espace que recense sa verte lumière
.
Ou comme après la pluie qui féconde les arêtes et les ombres
Qui rend aux ocres des falaises leur vivacité Qui surprend
les plantes et les lave et leur rend leur forme inexplicable
à quoi chacun s'étonne de se reconnaître en plein mysterre...
.
Urzeit
.
Il est le père Il tient dans ses bras le fruit de son émoi
L'enfant léger pourtant si lourd de conséquences
déflagration d'avenir monstre de fragilité robuste
dernier maillon d'une chaîne de survivants qui remonte
.
au-delà des aurochs des tigres à dent de sabre des ours géants
au-delà des premiers dinosaures des poissons primitifs
jusqu'à la prime étincelle de vie étonnée d'exister soudain
sous forme de microbe auprès d'un fumeur noir océanique
.
À présent que te voici - bambin Ezra - tous nous mourons
un peu moins Tous nous te regardons comme on suit qui vagit
en s'éloignant d'un vol serein vers l'horizon la mouette de la lumière
car ton petit corps emporte un fragment de nous tous vers demain
.
Langage d’oiseau
.
Sur la maison passent mouettes pies heures ou nuages
Un clignement de soleil éveille le feuillage de cristal
près de la porte d’entrée que justement toquent des visiteurs
Il viennent voir le bébé gigoteur et mesurer la merveille
.
C’est une fleurette dans un champ caressé par le vent
Un bourgeon à peine poussé de sa branche et qui désire
inconsciemment devenir branche à son tour Appeau vivant
il s’entraîne à de petits cris d’oiseaux assoupis
.
D’ici quelques années je t’imagine Ezra tendant le doigt aussi
pour qu’un oiselet l’agrippe de ses pattes frêles Vous vous
regarderez l’un l’autre avec curiosité Peut-être même avant
qu’il ne revole aurez-vous échangé quelques mots flûtés
.
dans cette langue primordiale qu’aujourd’hui j’ai perdue…
.
Conversion
.
Vieillard amer voici que j'avais commencé à détester
l'univers entier – qui le mérite bien faut-il le rappeler -
puis Ezra Flynn tu m'es apparu Le monde a basculé
dans la lumière d'une indulgence insolite pour moi
.
Quel talent cette petite enfance pour changer l'hiver
en tiédeur printanière avec partout des roses et des lis
Ce qui nous semblait mièvrerie se change en simple élan
de tendresse Les pleurs discordants – en joyeuse chanson
.
Même ton regard sévère de nouveau-né me fait sourire
Tu fronces tes sourcils comme un qui peine à identifier
le décor et les gens fort différents des agréments du Paradis
lequel pourtant avec ta présence s'acclimate parmi nous
Échange
.
Gracieux garçonnet attendu comme il me plaît de voir
avec quelle tendre force ton père te prend dans ses bras
Toi qui n'est encore qu'un poids plume – petit coq !
Un flocon de douceur endormie et tout auréolé d'amour
.
On dirait que tu t'es posé comme un duvet de neige
ici-bas Hier personne Aujourd'hui dans l'osier du nid
le miracle aux paupières closes qui respire sous le linge
immaculé Petite vie prodigieuse d'assurance et de sérénité
.
Je tends mon doigt à ta menotte et tu l'agrippes en dormant
et c'est une telle humble merveille que ce geste de l'instinct
par lequel déjà tu t'empares - toi mignon somnambule aimé -
de ce qui s'offre à toi pour que tu l'aimes à ton tour !
.
Ombre et lumière
.
Il faudra bien un jour – enfant de mon enfant -
que je t'apprenne un peu qui sont les bons et les méchants
comme je l'enseignai jadis à l'enfant qui fut mien
et dont tu viens de faire un père sans me consulter
.
Mais le plus tard possible afin de laisser une chance
à ton bonheur parsemé de sanglots encore à ton échelle
Il sera bien assez tôt venu pour toi le temps de découvrir
la perspective et d'aller de ton regard pur chercher dans les lointains
.
tous les affreux secrets que cèle la planète Autant d'histoires
et drames hérités qui ne partagent rien avec le pacifique azur
...Qui sont les bons et les méchants – car à la fin il faut
bien appeler un chat un chat et connaître la vraie justice
Emotion nue
Trois petites filles dansent dans Chaplin Road
Elles portent de longues robes roses piquées de fleurettes
Et s'exercent ensemble à des figures compliquées
Qu'interrompt par moments une légère averse
.
Les voix des fillettes parlent un dialecte du sud de l'Inde
Ezra dort dans son berceau Parfois il sourit aux anges
d'un sourire énigmatique de petit Bouddha
Haut comme trois pommes en lui le mystère de l'univers
.
Quelle puissance inexplicable cette enfance si petite
Et sans armes autres que son sourire et ses larmes
Elle se joue de nous avec une aisance magnétique
En activant au fond de nous un invincible lien d'amour
Averse à Heron rd.
La voix du nouveau-né à l’étage monosyllabe de cristal
Alterne avec l’autre voix douce apaisante et ferme de sa mère
Dans les vases sourient les fleurs en silence étamines en avant
Il faut que le petit découvre au plus tôt les beautés du monde
.
L’averse par instants colle sa face larmoyante à la fenêtre
Curieuse de savoir à qui appartient ce dialogue originel
De son berceau le nourisson cherche quelle inconnue présence
Fait contre la vitre ce cliquetis d’ongles limpides qui éclaire
.
Oreille minuscule coquillage Cheveux fins sur ce crâne poli
comme des algues par la mer collées sur un beau galet rond
Vagissements rythmés comme ceux des ondins de l’écume
Ainsi qu’il sied à celui qui est désormais le dieu de la Mère !
Passage du témoin
Joli bébé vêtu de vert ainsi que le printemps
Tu t’essaies la voix tandis que Mozart déroule
tout bas près de ton berceau sa chansonnette au piano
Et le soleil cligne de l’oeil entre deux cheminées de briques
.
couronnées en dents de scie comme à la fête des rois
Toutes les maisons du quartier semblent s’être coiffées
de ce même ornement en ton honneur Elles savent
Fort bien que c’est toi Ezra Flynn l’héritier de nos songes
.
Et spéculations fantasmatiques sur l’avenir C’est toi
qui relances l’espoir de vies que l’inattendu avait désertées
Toi la graine d’un bonheur immense effrayant et fragile
qui serres mon index comme s’il pouvait t’en montrer la route
Paysage maternel
Sous le feuillage de cristal en lequel se joue le soleil
mère et enfant communiquent par ronronnement doux
de visage à visage cheveux pendant en avant jusqu’à
l’épaule du bambin en contemplation extatique
.
Ce que consultent ses yeux c’est l’humeur du paysage
que sont pour lui les yeux le menton le nez les mèches
à portée de mains pinces miniatures qui agrippent
par surprise avec la force du vespertilion somnenvolé
.
Pourtant elle aime, Ezra, tous tes incertains caprices
Un sourire de toi lui fait bondir le coeur - plus tard
chaque mot que tu lui diras s’y déposera pour toujours
Car c’est ainsi que sont terriblement faites les mères
.
Encore un matin
.
pour Cassie
.
Lenteur pour l'innocence aiguë de ton regard - Ezra
Comme en un film au ralenti Comme en songe
à mes gestes prudemment je tiens la bride
pour ne pas risquer de t'effaroucher
.
Quelque mystère en ton sourire à demi-dormant
m'apaise On dirait une bombe qui aurait promis
de n'exploser que dans très très longtemps Ma main
sent que bat une minuterie dans ta poitrine frêle
.
Ta respiration infime est une musique tranquille
Tu es serein comme un qui se sait bien aimé
Autour de ton sommeil le petit-jour chuchote
À te contempler s'attardent au ciel deux ou trois étoiles...
.
Obsolescence
.
Si le loisir Ezra m'en est laissé je te dirai
un jour combien notre monde fut différent
Les colombes arpentant les tuileaux de mon village
Aux champs l'appel exquis des pruniers sauvages
.
Les hautes cannes vertes qui nous protégeaient
nous amoureux des regards tristes et réprobateurs
tandis qu'au clocher de fer forgé sonnait six heures
et qu'au ciel les hirondelles criaient de bonheur
.
En ce temps-là le soleil régnait sur le pays des origines
Les rues n'étaient que sourires et que signes d'amitié
Respect aux cheveux blancs respect au patois provençal
Et les jours de marché pour nous étaient des jours de fête...
.
Allegretto vivo
.
D'un bref cri de chaton te voici affirmant ta vie
Ezra Deux mains sur le visage tu t'assoupis
En toi tout en détails est délicieuse miniature Ongles
minuscules de nacre transparente Doigts gracieux
.
et comme nonchalants Bras ronds et grassouillets
Mignon corps qui gigote comme une grenouille
qu'on a mise sur le dos et qui cherche son étang
intangible désormais Et ces moments d'une voix
.
Une voix qui sait qu'elle n'a pas besoin de dire
Qu'une claire syllabe encore animale suffit et qu'alors
des puissances familières vont venir à la rescousse
de tes désirs de nourrisson et de tes impensables rêves.
.
Ezra – après vingt-quatre heures
.
Petit gémeau Petit fruit rose et souriant de tant d'attentes
si patiemment entretressées entre deux mondes
te voici donc Et voici que chacun s'extasie au moindre
geste de ces doigts que tu découvres Au moindre bâillement
.
arrondissant comiquement ta bouche et te fermant les yeux
Les vieux sur ton visage scrutent des invitations à l'espérance
Les plus jeunes détaillent les indices indécis de ressemblances
Tu rayonnes dans la simple gloire qui fait la beauté des mères
.
Bonjour à toi de la part de l'Humanité Tes pareils te saluent
Ils savent en quel chemin de fleurs de pierres et de braises
aventuré tu vas devoir comme on dit couler désormais tes jours
Des jours qui suivront celui-ci et seront doubles comme toi.
.
Avant toute parole
.
Quels tours utiliser pour parler de l'enfance à peine
irrompue avec ses mains minuscules et potelées
en ce bas-monde visqueux à force de mystère
Un cri bref lui suffit mais ne nous suffit plus Il faut
.
pour nous un plus long souffle Un courant de phonèmes
variés et miroitant comme en secret de l'énergie du poème
Il nous faut un delta composé des discours les plus divers
afin qu'existe pour nous l'Autre et qu'on existe pour lui
.
Oh de nouveau habiter le regard de cristal de l'enfance
Revoir la merveille du monde à l'envers et ces visages
penchés vers moi qu'auréole un azur d'une telle envergure
qu'en poussette on pressent ce qu'un jour on va nommer infini !
.
Dix minutes après
.
Joli petit dormeur qu'encore ta mère veille
lorsqu'on te parle tu miaules comme une mouette
et te rendors aussitôt parmi les nuages de ton paradis
à tire-d'esprit filant à travers l'espace de tes rêves
.
Qui peut croire que tu serais absent lorsque tu réponds
grâce à ce puissant inconscient qui déjà s'est attelé
à la tâche de créer un monde avec tes sens nouveaux
favorisée par le magnétisme de l'amour qui te cerne
.
Mignon centre de ton univers déjà tu cherches le site
d'où s'écoule la vie généreuse abondante et tiède
qui te porte et te nourrira de sa violente tendresse
jusqu'à te reconnaître assez grand pour happer au vol
- les pieds campés solidement sur Terre - d'autres rêves.
.
À toi songeant, Ezra...
.
À toi songeant, Ezra, un champ de marguerites sous les oliviers
m'apparaît. C'est irrationnel comme tout ce que je sais qui durera
plus que moi-même. Toi aussi peut-être iras-tu voir à Olympie
le printemps, ou bien à Corfou, l'île émeraude où l'on est heureux…
.
J'espère qu'en ton temps les splendides ruines existeront encore.
J'espère qu'il y aura un monde et qu'il te semblera, toi qui n'auras pas
connu le mien en train de sombrer dans les profondeurs de l'histoire,
aussi vivable qu'il se peut lorsque, homme fait, nous échoit un rien
.
de bonheur, une frimousse rose à peine éclose dans ses linges clairs,
endormie entre les bras d'une mère étonnée, avec sur son visage
l'invisible immensité d'aimer que seule l'expérience d'un regard
qui a longtemps fixé la face de sa mort peut fugacement déceler.
.
Sentences pour Ezra
.
Il redoutait qu'en sa flûte de roseau la vibration de vie qui portait la mélodie ne s'éteigne. C'était un frémissement qui avait survécu depuis le temps de Saxahuaman, le temps des guerriers farouches aux oreilles d'or. Certains instruments vous apprennent l'âme d'un peuple.
*
Je crois à l'humain lorsque la pensée est floraison spontanée de la nature humaine, non l'effet d'un échafaudage artificiel déserté par l'émotion.
*
Un philosophe qui ne serait pas fondé sur un poète, qu'il soit en lui-même ou extérieur, ne saurait penser ni utilement ni humainement. (Idem pour un homme de science.)
*
La foudre est pour le poète la face cachée de l'éternité.
*
Terroriste, tu crois avoir démodé les roses. Ta faiblesse est de n'avoir pas conscience qu'elles te survivront.
*
Le poème et le souffle avec le temps se fragmentent. Un seul fragment pourtant suffit pour un esprit pénétrant à témoigner de l'existence d'une civilisation ignorée.
*
Dis-toi que, tout brisé que tu puisses être, tu n'es jamais que le reflet du chaos qui t'a vu naître. La lumière verticale en triomphera.